La semaine de quatre jours de travail : entre théorie et faisabilité

15 June 2022

On ne va pas se le cacher on apprécie tous les week-ends de 3 jours rendus possibles grâce à des jours fériés ou à des congés. Mais un tel modèle de travail peut-il être mis en place de façon pérenne ? Dans cet article, nous allons comparer les divers avis des spécialistes sur la question en tentant de comprendre si le fait de travailler 4 jours peut être viable à long terme pour les entreprises.


Avec la crise sanitaire et économique, le débat concernant la semaine de 4 jours de travail refait surface. Ce dernier avait été amorcé par diverses figures depuis les années 1990. Mais qu’en est-il aujourd’hui ?

La semaine de 4 jours de travail, qu’en disent les professionnels ?

L’économiste américaine Juliet Schor souligne que malgré le fait qu’elle étudie le travail depuis les années 1980, elle n’a jamais vu un tel phénomène que celui se produisant actuellement : « l’anxiété liée à la pandémie a envahi le monde entier ». Elle détaille également qu’aux États-Unis le nombre de démissions n’a jamais atteint un tel niveau avec plus de 4 millions de départs par mois.  Pour cette sociologue, c’est en réaction à cette situation que certaines entreprises ont instaurée 4 jours de travail et pour cette femme ce modèle est tout à fait réaliste. Selon elle, la semaine de 4 jours procure un double bénéfice en permettant plus de temps libre à l’employé et en supprimant les activités les moins productives. Toutefois, cela nécessite au préalable une réorganisation du travail. Elle donne un exemple concret permettant de gagner en productivité : envoyer un message à son collègue au lieu de perdre du temps à l’appeler et diverger sur d’autres sujets. Concrètement, la Norvège et le Danemark qui sont les 2 pays européens où la moyenne de travail est la plus faible : travaillant environ 1 380h par an, ont une productivité respective de 90 et 84.   À contrario, le Royaume-Uni et l’Italie, où le nombre d’heures travaillées par an dépasse 1 700h, recensent une productivité de 59 pour les britanniques et de 60 du côté des italiens.

Un modèle testé à grande échelle dans divers pays

Depuis le 1ᵉʳ juin 2022, plus de 70 entreprises britanniques testent la semaine de 4 jours de travail, et cela, pendant 6 mois consécutifs. Les employés verront également leurs salaires maintenus au même niveau qu’auparavant. Cette expérimentation se fonde sur le système 100-80-100. Ce dernier inclut 100% du salaire pour 80% du temps de travail initial en contrepartie d’un maintien à 100% de la productivité.


Il s’agit d’un test de grande envergure et d’une importance capitale pour le pays où de nombreux postes restent encore à pourvoir. Une fois l’expérimentation achevée, les résultats seront analysés par des chercheurs d’Oxford, de l’Université de Cambridge, mais aussi du Boston College. Il s’agit donc d’une expérience grandeur nature afin de voir si ce modèle de travail peut être viable à long terme. Il faudra donc attendre les résultats des experts afin de constater les bénéfices ou non de ce système.  L’entreprise Microsoft au Japon a aussi testé la semaine de 4 jours de travail. Les dirigeants affirment que la productivité a été augmentée de 40%. 



Qu’en est-il en France ? Nous avons constaté que seulement 5% des entreprises dans notre pays ont opté pour ce modèle de 4 jours travaillés. À titre indicatif, la société française LDLC a mis en place la semaine de 32h depuis la fin de l’année 2021. Le président de l’entreprise en retient que du positif, soulignant le gain de productivité et la bonne ambiance sous-jacente. « Il y a un an et demi, on faisait 497 millions d’euros de chiffre d’affaires à 1 060 collaborateurs et cette année, on va réaliser 730 millions d’euros à 1 040 collaborateurs », énonce-t-il lors d’une interview en mars 2022.  La firme française Yprema a été l’une des premières entreprises à implémenter ce système. En effet, la société a adopté ce système dès 1997 à un moment où il ne s’agissait pas encore d’une pratique très répandue. Les ouvriers sont passés de 39h travaillées en 5 jours à 35h sur 4 jours. Et le résultat s’est révélé être un franc succès puisque la productivité a été augmentée de 12%.

Entre avantages et inconvénients

56% des employés se disent préférer travailler quatre jours au lieu de cinq. Voilà le constat qui a émergé de l’étude The Workforce View in Europe 2019 menée par ADP. Il s’agit d’un chiffre tout de même considérable puisque plus de la moitié des travailleurs interrogés sont en faveur de ce modèle. Cela dit, l’on aurait pu s’attendre à ce que les chiffres soient bien plus en faveur de la semaine de 4 jours. En travaillant 4 jours, l’employé aura davantage de temps libre et pourra passer plus de temps en famille notamment. Cela permet de réduire le stress et d’améliorer par conséquent la qualité de vie au travail. L’employé pourra donc arriver en pleine forme au travail, ce qui le rendra plus productif. Outre les bénéfices pour l'employé, les avantages environnementaux restent indéniables. Selon une étude publiée par l’association Platform, une semaine de 4 jours serait particulièrement bénéfique pour la planète, permettant de réduire l’empreinte carbone du Royaume-Uni de 127 millions de tonnes par an d'ici à 2025. Cela entraînerait une diminution de 21,3%, ce qui peut constituer un bienfait considérable pour la planète.


Lorsque la firme Microsoft au Japon a réalisé ce test, elle a constaté une réduction de 23% d’électricité et de 60% de papier, ce qui n’est pas négligeable.

Globalement, la semaine de 4 jours déséquilibre l’emploi du temps en imposant un rééquilibrage des tâches. Ainsi, l’employé doit revoir ses priorités et réaliser toutes ses missions en 4 jours et non plus 5 jours : il sera amené à faire de plus longues journées. Ainsi, cela peut amener une surcharge de travail, les employés peuvent vite se sentir débordés ce qui va de la même façon augmenter le stress et l’anxiété du salarié. Tout cela peut produire l’effet inverse que celui escompté en entravant de ce fait la productivité des salariés. Instaurer des semaines de 4 jours contraint aussi les dirigeants à réorganiser toute l’activité de l’entreprise, ce qui demande un temps supplémentaire dédié à ce travail d’organisation. De plus, si le modèle ne fonctionne pas cela entraîne des pertes financières considérables. Le risque est donc très élevé. Il faut également s’attendre à une reconsidération salariale. En effet, d’autres entreprises dans divers pays ont tenté d’instaurer ce modèle de 4 jours travaillés. Par exemple, la société espagnole Desigual a fait le test de la semaine de 4 jours, mais ce dernier ne s’est pas révélé aussi prometteur qu’espéré. En effet, les salariés ont vu une diminution de 6,5% de leurs salaires. De ce fait, en optant pour la semaine de 4 jours, les employés doivent avoir conscience que leurs salaires peuvent être revus à la diminution comme ce qui est arrivé pour les salariés de la société Desigual. Implémenter une semaine de 4 jours nécessite au préalable d’effectuer un travail au sein des mœurs. Ainsi, c'est un cheminement de longue durée et un tel modèle ne sera pas mis en place prochainement.   Si tu souhaites obtenir des informations complémentaires sur la semaine de 4 jours ouvrés et qu’en parallèle, tu veux améliorer ton anglais, n’hésite pas à visionner la vidéo TED associée en cliquant sur ce lien.


Article rédigé par Cynthia SCHMITZ

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